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La Chine face au monde

By Bernard

Je viens de lire un livre intéressant sur la Chine.  C’est une groupe français :  la Fondation pour les Études de Défense nationale qui l’a produit en 1983:  La Chine face au monde.  C’est donc une vision française de stratégie internationale touchant la politique internationale, mais ça touche aussi beaucoup la politique intérieure de la Chine, parce que les deux vont de pair.

Ils disent que la Chine a eu trois grandes politiques :

  1. À partir de 1949, une politique prosoviétique parce que la Chine est communiste et qu’elle priorisait sa sécurité;
  2. À partir de 1959, une politique de grande puissance qui se voulait indépendante avec les exagérations idéologiques de Mao vieillissant;
  3. À partir de 1969, une politique pro-occidentale de modernisation parce qu’elle se sentait menacée par l’ours nordique.

Lors de la Libération, le premier octobre 1949, avec la proclamation de la République populaire de Chine, c’est une situation de Guerre froide qui dominait le paysage mondial.  Pour assurer sa sécurité devant les ÉUA tout puissants, qui occupaient le Japon, Formose et le reste de l’Asie du sud, la nouvelle Chine a dû chercher une protection chez son voisin soviétique.

Mao et Khrouchtchev

Évidemment, cette protection lui a coûté cher, très cher même.  Et pas seulement en devises.  En idéologie surtout, ce que Mao n’aimait pas.  Ses rapports de la période ont préparé le conflit entre les deux frères communistes.  Et c’est l’originalité de cette vision maoïste que je retiens.

Zhou signe le Traité d'Amitié 

Dès 1946, dans ses entretiens avec la journaliste Anne Louis Strong, Mao avait déjà mentionné qu’entre les deux grandes puissances, ÉUA et URSS, il y avait une immense zone englobant des pays capitalistes, coloniaux et semi-coloniaux, en Europe, en Aie et en Afrique.  Cette zone était divisée elle-même en deux zones intermédiaires: 

« La première catégorie groupe les pays indépendants et les pays en lutte pour leur indépendance en Asie, en Afrique et en Amérique latine.  La seconde s’étend à l’ensemble de l’Europe occidentale, de l’Océanie au Canada et aux pays capitalistes qui forment la seconde zone intermédiaire.»

En 1965, Mao aboutit avec la théorie des trois mondes :

  1. Les deux pays hégémoniques ;  dans ce premier monde, l’URSS est la plus dangereuse à cause de son apparence socialiste qui peut tromper les peuples ;  il faut donc combattre l’URSS en priorité.
  2. Les pays développés profiteurs ;  la Chine n’a qu’à manœuvrer avec ces pays ; et finalement
  3. Le tiers-monde dominé, ami et partenaire.

En avril 1974, Deng Xiaoping à l’ONU va présenter officiellement cette vision des trois mondes.

Sous les empires précédents, la Chine avait aussi une vision de trois mondes :

  1. Évidemment, le centre du monde, «Zhongguo », la Chine, c’est son nom ;
  2. Un second monde formé des pays limitrophes où habitent les barbares qui apportent leur tribut à la Chine ;
  3. Finalement, le reste du monde si barbare qu’ils ne reconnaissent même pas la suprématie chinoise !

Difficile de résumer le livre de 250 pages.  Mieux vaut de le lire !

Je reprends les trois politiques avec la vision des trois mondes :

  1. La Chine s’allie à l’URSS pour sa sécurité, mais Mao sent rapidement que l’URSS est plus dangereuse que les ÉUA.
  2. La Chine a une politique d’indépendance appuyée sur l’idéologie du grand timonier, qui aboutit à la Révolution culturelle, un cul-de-sac.
  3. La Chine s’allie à l’autre pays dominant, affaibli par la guerre du Viêt Nam et les troubles intérieurs.

En janvier 1975, devant l’Assemblée nationale populaire, Zhou Enlai présentait les quatre modernisations :  agriculture, technologie et défense.  C’est son testament politique.

Deng et les quatre modernisations

Zhou a aussi ramené Deng et d’autres dirigeants des années 1955 aux principaux postes du gouvernement.  C’est cette équipe qui a repris le pouvoir de la « Bande des quatre » en 1976, moins d’un mois après le décès de Mao.

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